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Paris — mardi 10 juin — vers 1 h du matin

10 juin 2008

C’est la nuit qui suit une chaude et longue journée : la chaleur est présente encore. Dans les restes effilochés de cette brise thermique qui sèchent une dernière fois les peaux luisantes de sueur sans les laver, dans cette sensation de présence lourde et terrestre à chaque pas, dans les épaules qui tombent, dans l’épaisseur de l’air qu’on inspire.

C’est cette chaleur à la fois moite et sèche.

C’est cette odeur enfantine et fabuleuse, de la terre sèche qu’on arrose la nuit tombée. L’air est granuleux, minéral, rêche sous la langue, dans le sillage des jets d’eaux des jardins désertés, qui embaument de parfums mourants à la nuit qui naît.

C’est cette odeur que je cherche et recherche à chaque nouveau printemps, à chaque nouvel été, comme celle des pins sablonneux au bord des plages atlantiques, ou des marronniers ruisselants des rentrées de classe.

C’est cette odeur d’un bonheur furtif que j’ai trop peu connu, que l’on croit à jamais unique, invariable, sans possibilité de retour, que l’on vit sans se soucier que ce ne sera pas le dernier, avec cette ingénuité toute particulière qui renaît en moi ce soir.

C’est cette odeur qui assourdit soudain la rumeur urbaine en longeant les parcs.

C’est cette odeur sans laquelle la chaleur de la journée passée serait une erreur.



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