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Fiction G. — Intro

2 décembre 2008

Durant ces neuf derniers mois (déjà !), j’ai travaillé sur Gainsbourg (si vous voulez lire l’article que j’en ai tiré, comme une ébauche d’une plus vaste recherche, demandez-le moi). Au début, c’était un travail pour lequel je me suis porté volontaire, un peu rapidement peut-être, mais il fallait que j’impose ma voix dans cette réunion. Ma proposition a été acceptée et le sujet m’a ensuite accompagné — hanté — sans que j’y travaille réellement pendant quelques mois. C’est un processus normal chez moi, mélange de maturation et de procrastination, de réflexion mêlée d’intimidation et de paresse.

Entendons-nous, j’aimais Gainsbourg, et je le connaissais au moins autant qu’un garçon comme moi, avec l’éducation que j’ai pu recevoir et le parcours éducatif et amical dont j’ai fait l’expérience, peut connaître Gainsbourg. Un peu mieux, peut-être — l’héritage de Boris Vian, les qualités de facture de ses chansons, les influences diverses, le travail des mots — tout ça ne m’échappait pas et passait régulièrement au rouleau de mes réflexions. Mais sans plus. Je n’étais pas spécialiste — et je ne prétends pas davantage l’être aujourd’hui, malgré tout le temps que je lui ai consacré. Mais je me suis peu à peu pris au jeu. Au cours du travail, j’ai fait des rencontres fabuleuses, certaines inattendues, d’autres que je n’aurais jamais espérées dans mes rêves les plus fous — bref, beaucoup de bonnes surprises. Et, si j’aimais Gainsbourg au début, mon admiration, mon affection, est allée croissante pendant toute cette période.

Ma fascination aussi. Fascination pour ce personnage qu’il s’est façonné pour lui même, pour la personne qu’il s’est créée de toute pièce ou presque — son véritable chef-d’œuvre, c’est peut-être justement ce personnage même, qui lui était à la fois de plus en plus propre et de plus en plus étranger à mesure qu’il approchait du terme — auquel il n’avait aucun espoir (aucune intention ? ou aucun moyen ?) d’échapper. (Je ne fais ici qu’enfoncer des portes ouvertes, je sais.) Devenir mythe de son vivant — mythe, au même titre que Œdipe ou Tantale, selon moi du moins —, mythe qui suscite inéluctablement toutes sortes de projection — coquille vide, réceptacle de fantasmes, cristallisateur d’émotion, d’amour et de haine.

De plus en plus, pour faire dans l’originalité (pouf pouf), j’ai eu envie d’écrire sur lui — non plus seulement sur sa musique comme je m’étais engagé à le faire, mais sur lui — écrire sur lui sans nécessairement l’afficher lui-même. « M’inspirer » de son histoire, de son phénomène.

Tant à faire, tout à dire.

Je ne veux pas parler de lui textuellement, retracer, faire une biographie, même romancée. Non.

Ecrire une fiction avec lui en point de repère, amer de la navigation, plus ou moins lointain, mais toujours à distance — une distance convenable, une distance respectable même, on parle d’un mythe, quand même, un peu de respect.

Les sujets, les idées, sont nombreux qui m’ont passé par la tête. Comment vit-on un personnage de cette envergure-là, quand on est, de fait, parmi ses proches (ses parents, ses sœurs…) ? Comment vit-on ses provocations, ses frasques, son talent, ses déceptions, sa médiatisation, son quotidien.

Et cette manière qu’a chacun, qu’il l’ait connu ou non, de projeter sur lui — tableau noir effaçable à l’envi — ses propres fantasmes, ses propres névroses. Il devient à la fois un référent, un exemple, un comparatif, et un sujet d’appropriation, d’identification.
Bref, comment vit-on l’absence d’un type comme lui ?



Dernier ajout : 18 avril. | SPIP

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