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Vendredi 27 mars

D’autres victimes indirectes encore

vendredi 27 mars 2020, par Jérémie Szpirglas

On a déjà beaucoup parlé des victimes indirectes de cette épidémie. Notamment en raison du confinement : dépressions, suicides, chômage (qui entraine dépressions et suicides), accidents ménagers, violences conjugales pouvant mener au meurtre, violences sur les enfants… et, bien sûr, blessures dues à une surexcitation des enfants en intérieur — risque qui, pour moi personnellement, est le plus immédiat.
Il en est encore un autre dont on parle peu, mais que je commence à entrevoir de manière aigue : les accidents de trottoirs. Non pas de la route, non, de trottoirs.
Parce que les rues sont vides, c’est entendu. Du moins beaucoup plus vides que d’habitude. Mais cela concerne surtout la chaussée. Les trottoirs, eux, sont encore assez peuplés. Pas autant qu’à l’accoutumée mais… mais… Finalement, les « usagers » du trottoir, c’est-à-dire ceux qui l’utilisent, non pas comme voie pour se rendre dans un endroit particulier (magasins, etc.), mais ceux qui l’utilisent en tant que tel, sont toujours aussi présents : je veux par exemple parler des promeneurs de chien. À cet égard, surtout dans un quartier comme le mien, proche du périphérique (dont les rues servent donc assez peu à la promenade en temps normal), les trottoirs sont presque aussi pleins que d’habitude. Et ils servent, comme de bien entendu, de toilettes pour chiens et autre dépotoir. Et comme les services de la mairie sont moins actifs, c’est comme si personne jamais, depuis deux semaines au moins, n’avait tiré la chasse : je vous laisse imaginer l’état de certains trottoirs.
J’en fais l’expérience quotidiennement, lors de cette promenade si chèrement attendue que je fais avec mes enfants. Lesquels, dans l’objectif de tirer au mieux partie de l’escapade et d’y dépenser le plus d’énergie possible, ne manquent pas de les faire, en rollers, en trottinettes, en vélo… Et, bien sûr, il leur arrive de tomber. Désormais, je dois donc éviter certaines artères proches de chez moi, pour être sûr que mes enfants ne tomberont pas la tête la première dans quelque déjection ou flaque odoriférante.
Je constate également que les propriétaires de chiens ont comme perdu la bonne habitude qu’ils avaient (pour la majorité d’entre eux) de ramasser les crottes de leur animal de compagnie derrière eux. Comme s’ils ne pouvaient remplir qu’un seul et unique devoir civique à la fois : le confinement (et sortir le moins possible, équipé de son laisser-passer) et nettoyer derrière leur inutile cerbère.
Non loin de chez nous, il est un endroit, également, où ils peuvent généralement s’en donner à cœur joie, en l’absence de toute circulation : l’esplanade d’un stade. Le problème, c’est que les services de la mairie de sont pas repassés depuis le dernier match et que les quelques bouteilles de bière éclatées sont maintenant, à force de passage de deux roues en tout genre, réduites en micros morceaux de verre qui couvrent toute l’esplanade, comme un tapis de fakir. Bientôt, je ne pourrai plus les y emmener : trop dangereux. À chaque chute, je risquerais de retrouver des éclats de verre enfoncés dans leurs plaies.
J’espère qu’aucun lit d’hôpital ne servira à un enfant ainsi blessé…