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Samedi 2 mai
General Pause — Chapitre 3
samedi 2 mai 2020, par
Il y a deux petits siècles, à la Reconnaissance, les historiens et scientifiques ont, comme pour tous les autres domaines de la connaissance, voulu en finir avec des siècles d’obscurantisme et conséquemment remis en question ces légendes pour chercher d’autres explications plus rationnelles. Le collectif des Perséides, dans son entreprise radicale de réécriture d’une histoire de l’humanité, a alors proposé l’hypothèse d’un agresseur extraterrestre : le vocabulaire belliqueux, que l’on croise si souvent dans les fragments qui nous sont parvenus, est certainement responsable, ici, de cet égarement. Dans les diverses langues qui avaient alors cours à la surface de la planète (manifestement, les océans étaient pour une fois épargnés), les termes de « guerre », « d’ennemi », de « défense », « d’arme », voire « d’arme absolue », de « victoire », reviennent inlassablement.
Dans cette hypothèse, corroborée par des documents kinéticoniques d’époque, l’envahisseur aurait surgi dans le ciel, soit au moyen de gigantesques spatiocules de la taille de continents soit, plus vraisemblablement, grâce à des technologies furtives embarquées à bord d’astéroïdes intersidéraux. Les envahisseurs auraient certainement du emprunter plusieurs correspondances astéroïdiennes pour faire le chemin en provenance de leur galaxie (probablement proche de la nébuleuse de la Porte Dorée), sautant d’astéroïdes en astéroïdes selon leurs stations et destinations, et finissant probablement leur voyage sur le dos d’une Comète. L’identification de ladite comète a du reste été à l’origine de la terrible controverse qui mena à la rupture dramatique du collectif des Perséides — avec à la clef la mort du Grand Satrape Anvi, même si certains pensent que les motivations de son assassin étaient plutôt d’ordre sentimental, peut-être la jalousie ?).
Résistant admirablement aux rigueurs du voyage, les envahisseurs auraient toutefois connu un petit souci en pénétrant l’atmosphère terrestre. Ayant mal dosé, d’un epsilon vraiment, l’équilibre gazeux de ladite atmosphère — un de leurs outils ayant été égaré au cours d’une correspondance, comme cela arrive si souvent, comme le suggère si merveilleusement l’étymologie du verbe —, leur calcul de l’angle de pénétration était erroné. D’où, toujours selon les Perséides, une surchauffe du véhicule, qui força ses occupants à changer de nature et à retrouver une forme protocellulaire symbiotique. Ses êtres étant doués d’une admirable capacité de résilience, ils cherchèrent à tout prix à se reconstituer en individus complets. Les protocellules voulurent donc se rapprocher les unes des autres, profitant en cela des véhicules qu’elles trouvèrent nombreuses à leur disposition : les êtres humains.
Leur phase de reconstitution fut, dans cette hypothèse, incroyablement rapide, puisque, en à peine trois mois, les envahisseurs étaient identifiés comme tels par les sociétés terrestres, qui se lancèrent alors à cœur perdu dans une guerre sans merci.